Message #49267

Claire FOURIER (via "Facebook")
rédigé le Samedi 20 Juin 2020
Désultoirement vôtre ! - Archives, histoire, documentation - Références culturelles
"Sait-on ce que c'est qu'écrire ?" demandait Mallarmé. (Il répondait : "Une ancienne et très vague mais jalouse pratique dont gît le sens au mystère du coeur.")

Balzac avait déjà répondu, plus concrètement, à la question dans une lettre à son amie Zulma Garaud :
« J'ai lu un manuscrit de votre protégé. Il n'y a ni une phrase ni une idée. Il n'y a que le courage d'avoir écrit un certain nombre de feuillets. Le talent d'écrire ne se communique pas comme une contagion ; il s'apprend lentement. Je ne peux ni lui apprendre ce qui est un don du ciel, ni prendre sur moi la responsabilité de le tromper. S'il n'a pas de quoi vivre, il ne vivra pas de sa plume avant dix ans. Voilà le fait. S'il veut persister, il doit prendre un parti qui lui donne du pain, pendant qu'il étudiera. Puis il ne sait rien en histoire, il ne sait rien du monde, il ne sait rien de sa langue, il ne sait rien des passions, que voulez-vous qu'il écrive, quand il ne sait rien non plus des combinaisons dramatiques ? Ce jeune homme est toute notre époque. Quand on ne peut rien faire, on se fait homme de plume, homme de talent. On se donne le plus beau thème de l'existence, parce qu'on ne peut pas prendre le plus vulgaire. J'étais à son âge cet enfant. Mais qui voudrait des dix ans par lesquels j'ai passé ? Rencontrerait-il des femmes qui lui élargiront le crâne, entre deux caresses, en lui relevant le rideau qui cache la scène du monde ? A-t-il le génie observateur ? En rapportera-il des idées qui écloront à quinze ans de là ? L'on ne sait pas quel phénomène est un écrivain. Les écrivains seuls savent de combien de qualités ils sont composés : bonheur, talent, énergie, persistance, santé, seconde vue, que sais-je ? »

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