Histoire des bâtiments de la Chaslerie

Savez-vous qu'il existe une note de 10 pages rédigée par L. Blanchetière en 1852 sur La Chaslerie. Il y a un dessin du manoir depuis la porte cochère ainsi qu'un plan "aérien" de l'ensemble. On y trouve également des propos sur l'architecture et la famille Ledin (apparentée aux Cormier et Coupel).

Je peux vous l'adresser!

P.S. : serait-il possible de modifier cet espace d'échanges en y ajoutant la possibilité d'adresser des pièces jointes, du type photo en format JPG ?
@ Sébastien Weil :

Je ne pense pas que j'aie eu l'ouvrage que vous citez entre les mains, car je me souviendrais d'une vue du logis prise de la porte cochère et antérieure à l'incendie de 1884. Je serais très curieux de voir ce dessin, ne serait-ce que pour vérifier si, comme je le subodore, les fenêtres du 1er étage du logis étaient surmontées de lucarnes ; en outre, je serais très intéressé de voir la couverture originale du logis, avant qu'elle ne soit rebâtie 60 cm plus bas...

Je vous serais donc très reconnaissant de me transmettre le document évoqué (dessin et texte), par mail à penadomf@msn.com (pena comme La Haute Pénas, nom patois de La Haute Chapelle, et domf comme Domfront).

A ce propos, il faudrait certainement adjoindre une bibliographie à ce site. Je vais m'y employer, quitte à la compléter dès que de nouvelles infos me parviendront.

Quant à la suggestion que vous faites à la fin de votre message, j'en souligne l'intérêt à Thomas. A lui de jouer ! Dans l'immédiat, vous pouvez également m'adresser toute photo à l'adresse mail indiquée.

Incidemment, j'ai connu M. Jacques COUPPEL du LUDE, un homme d'affaires parisien apparenté aux COUPPEL et DURAND de SAINT-FRONT (donc à Marin Marie), qui s'intéressait à cette propriété parce que des "oncles" à lui (comme il disait) y avaient été élevés au début du 17ème siècle. Ceux-ci s'étaient alliés aux LEDIN de manière à conserver la charge de vicomte de Domfront. Par exemple, Brice COUPPEL, écuyer, Sieur de LESPINAY, vicomte de Domfront de 1615 à 1623 avait épousé en premières noces Marquise LEDIN, décédée prématurément, puis Nicole de MARGUERIT qui, devenue veuve en 1623, avait épousé en secondes noces en 1628 François LEDIN, écuyer, seigneur de la Chaslerie ; ce François LEDIN, dont Marquise LEDIN était la soeur, était lui-même le fils de René LEDIN qui fit construire - plus vraisemblablement reconstruire - en 1598 le logis du manoir. Par ce jeu d'alliances, François LEDIN fut vicomte de Domfront de 1628 à 1639, date à laquelle il démissionna de ces fonctions en faveur de son beau-fils, Siméon COUPPEL, etc.
@ Sébastien Weil :

L'illustration que vous venez de me transmettre par courriel est très intéressante et constitue, à ce jour, la seule représentation antérieure à l'incendie de 1884 que je connaisse.
Elle montre à quel point les anciens épis de faîtage du logis et des tours rondes étaient volumineux ; de la sorte, elle constitue une remarquable confirmation des déductions et choix (audacieux) que Dominique RONSSERAY, A.C.M.H., et moi-même avions faits lors de la restauration de ces éléments décoratifs typiques du Domfrontais.
Par ailleurs, elle donne une idée précieuse du caractère massif des combles d'origine du logis ; on y voit que la cheminée centrale, que l'on connaît aujourd'hui dégagée de la toiture, était à l'époque engoncée dans celle-ci ; ainsi, la "lecture" que nous avions faite des deux jets d'eau (voir le laïus du site) est pleinement confirmée.
Enfin, elle montre à quoi pouvait ressembler l'une des lucarnes à mi-hauteur de la couverture du logis, ce qui est pour moi une information inédite et très précieuse pour la suite des travaux.

En revanche, le plan que vous m'avez communiqué n'apporte pas d'information supplémentaire par rapport à ce que nous savions grâce aux vieux plans cadastraux déposés aux Archives de l'Orne : forme des douves y compris à gauche de l'allée principale en arrivant sur place, position du ruisseau amont, du ruisseau aval, division du "Pournouët" en deux parcelles.

Quoi qu'il en soit, merci pour cet envoi, très remarquable et qui fournit un très bel exemple de l'utilité d'un tel livre d'or.

Je veillerai à mettre une reproduction du dessin en ligne. Pour cela, il serait cependant préférable, pour la précision de l'image, que je puisse scanner votre document. Soyez gentil de me prêter l'original, si vous le pouvez.

Et encore mille fois merci !
Reçu ce matin, par la poste, la photo d'un article transmise par Sébastien WEIL que j'en remercie.

Il s'agit de "Notes recueillies sur l'arrondissement de Domfront, au mois d'avril 1852, par M. BLANCHETIERE, Membre de la Société Française", article publié en 1853 dans le "bulletin monumental ou collection de mémoires et de renseignements sur la statistique monumentale de la France ; 2è série, tome 9è, 19è vol. de la collection, par les Membres de la Société Française pour la Conservation des Monuments, publié par M. de CAUMONT" à Paris.

Louis BLANCHETIERE relate dans ces notes une excursion qu'il a faite dans l'arrondissement de Domfront en avril 1852. D'emblée, ces notes témoignent des préoccupations et des compétences géologiques de leur auteur, ainsi que de son intérêt pour les routes ; on peut donc se demander si ce n'était pas une sorte d'ingénieur des Ponts ou des T.P.E., comme l'on dit aujourd'hui.

Les notes relatives à la "Châlerie" occupent 10 pages du document et sont agrémentées de la reproduction de deux croquis qui doivent être de la main de Louis BLANCHETIERE. J'ai déjà commenté ces croquis hier, notamment l'un des deux, fort instructif quant à l'état du logis avant l'incendie de 1884.

Quant au texte lui-même, il est également riche d'enseignements, même si j'y relève une erreur de date, Louis BLANCHETIERE ayant cru que le logis datait de 1558, alors qu'il date de l'année de l'édit de Nantes.

On y apprend que les épis du logis étaient en terre cuite, ce que ne permettait pas de comprendre le croquis. A cet égard, la prudence manifestée par M. RONSSERAY dans son article annexé à ce site internet ne peut qu'être louée ; il a en effet pris ses distances avec les affirmations de VIOLLET-LE-DUC pour qui une couverture en ardoise devait s'accompagner d'épis en métal. C'est sans doute la proximité géographique de GER, lieu où étaient modelés ces épis, d'ailleurs avec une argile de LA HAUTE CHAPELLE, qui a permis à M. RONSSERAY de comprendre que cette industrie locale ne pouvait qu'inonder le pays de ses productions, poussant ainsi à une sorte de sur-consommation locale de ses "grès".

Louis BLANCHETIERE donne d'utiles informations sur l'occupation des bâtiments. Le "château" est "inhabité depuis la Révolution", servant "à peine à déposer des fourrages et bois" (pas étonnant que la foudre ait pu y mettre le feu en 1884...). En revanche, l'"aile gauche est aujourd'hui à peu près toute occupée par des fermiers", écrit-il.
"Presque tout le château" est recouvert d'ardoises, ce qui confirme qu'il y avait aussi de la tuile sur certains bâtiments sur cour (on le sait aussi grâce à une photo ancienne des écuries et du colombier).
Le logis comporte une "cuisine à très-grandes dimensions", sans doute la salle-à-manger actuelle puisqu'un four est toujours visible dans sa cheminée.
Le rez-de-chaussée et le "premier étage" (il y en avait donc un second, ce qui confirme la présence de grandes lucarnes) du logis sont "pavés en briques carrées", revêtement qui a aujourd'hui totalement disparu (sauf dans un coin de la cage d'escalier).

Louis BLANCHETIERE s'est beaucoup intéressé à la chapelle et à son décor intérieur. Il écrit en particulier : "Sur les murs se trouvent des fragments de peintures à fresque" (erreur, ce ne sont pas des fresques mais des peintures murales, obéissant à une autre technique ; les fresques sont peintes quand l'enduit n'est pas encore sec, contrairement aux peintures murales) "d'un fort bon style ; mais dont il est impossible de reconnaître les sujets, tant elles ont été détériorées par le temps et par le choc des fagots que les fermiers y déposent" (comme si le logis ne leur avait pas suffi, hélas !). S'ensuit une description de ces décors qui montre que, durant le siècle et demi suivant, les dégradations se sont poursuivies, Louis BLANCHETIERE ayant d'ailleurs compris que "Ce qui a malheureusement hâté la destruction de ces intéressantes décorations, c'est le peu de solidité de l'enduit qui les supporte. En effet, il n'est formé que d'une mince couche d'argile recouverte d'une pellicule de chaux, le tout cédant au moindre choc. Il est probable que cet enduit n'avait pas été fait en vue d'y appliquer des peintures, mais que l'artiste officieux, hôte du châtelain, aura, sans préparation, jeté à l'improviste ses heureuses conceptions sur les murs tels qu'il les a trouvés" (ici, je précise que cet artiste était en fait tombé amoureux de la servante du manoir qu'il a fini par épouser, un LEDIN lui servant même de témoin).
A la fin de ses notes sur la chapelle, Louis BLANCHETIERE s'intéresse aux noms peints sur les sablières intérieures de la chapelle, notamment ACHARD, LEVERRIER, FORTIN et de COURCELLES, CORMIER, COUPEL, ainsi qu'à Pierre IV LEDIN (à qui, s'étant trompé de dates comme on l'a dit, il attribue à tort la reconstruction du logis), Charles-Claude LEDIN et Pierre-François LEDIN.

En fin d'article, Louis BLANCHETIERE complète sa description du site de la Chaslerie et précise que les douves avaient "au moins 10 mètres de largeur et 2 mètres de profondeur" (il négligeait leur envasement, voir photothèque jointe), que "les fermes" (sans doute la ferme et la cave, pour reprendre ma terminologie) voisinaient un verger, et que des "charmilles alignées ombrageaient le jardin" (ce sont ces dernières remarques, que j'avais déjà lues, rapportées par un autre érudit local, qui m'avaient conduit à faire replanter un verger et des charmilles alignées à la Chaslerie).
Serais-je un incorrigible graphomane ? En tout cas, je ne tarde pas à reprendre la plume pour évoquer un point d'histoire.

Nous sommes le 17 août 2009. Donc il y a aujourd'hui exactement 125 ans que le logis et les tours rondes ont brûlé.

C'est dans le "manuscrit déposé à la mairie de La Haute Chapelle" (voir la bibliographie du site) que j'ai trouvé des informations sur cet incendie. Voir page 507 de ce document : la foudre a frappé sur "le pavillon, à l'entrée" (sans doute la tour Sud-Ouest). Les pompiers de Domfront sont arrivés le lendemain à 10 heures du matin (?!) alors que "dès 5 heures, toute crainte nouvelle d'extension du sinistre avait disparu". Le propriétaire était alors "M. Levêque, président du tribunal de Mayenne" et le fermier s'appelait M. Pommier. Ce manuscrit évoque l'état "délabré" du manoir avant l'incendie et, particulièrement, les "gracieux épis en plomb qui couronnaient si avantageusement les tourelles et les extrémités du toit principal" (il y a là une contradiction avec le témoignage de BLANCHETIERE en 1852 que j'ai analysé sur un autre "post" de ce Livre d'Or); à propos de ces épis, ce manuscrit précise que "très endommagées par l'incendie, elles (sic) n'ont pas été replacées".
Hier à Caen, j'ai revu Bernard DESGRIPPES, dont l'ouvrage sur les manoirs du Domfrontais est une utile mise à jour, notamment grâce aux photographies, d'un ouvrage original et de qualité paru au 19ème siècle (sous la plume de LASSEUR, je crois).

Comme moi, il assistait à la soutenance de thèse (ancien D.E.A.) de Sébastien WEIL. Ce dernier, présentant ses recherches sur le Domfrontais de 1650 à 1850, a obtenu du jury présidé par le Professeur MORICEAU, la mention très bien et la note de 18 sur 20. J'étais heureux d'être le témoin de cet exploit que nous avons fêté comme il convient.

Bernard DESGRIPPES m'a signalé à cette occasion être en possession de photographies sur verre représentant des manoirs du Domfrontais, dont la Chaslerie. Comme je suis toujours à la recherche de vues de la Chaslerie antérieures à 1884, cette information m'a intéressé. Il m'a aussi déclaré détenir de vieilles cartes postales de la Chaslerie que je ne connais pas puisque, comme il le sait, toutes celles qui me sont passées entre les mains sont reproduites sur la "Photothèque" du site.

Bernard DESGRIPPES semble cependant faire quelques difficultés à me montrer ces vieilles images, nouvelles pour moi.

Pour tâcher de justifier ses réticences, à mes yeux un peu étranges, il m'a déclaré que, lors d'un contact que j'aurais eu avec les parents de sa compagne, il y a une quinzaine d'années, je leur aurais vivement déplu ; or, je ne me souviens pas avoir eu l'honneur de rencontrer ces estimables personnes ; il paraît que j'aurais refusé de leur acheter de vieilles poutres que j'aurais déclarées "pleines de clous" (mais, si j'ai bien compris, ces poutres auraient depuis fini au feu, ce qui pourrait d'ailleurs, me semble-t-il, confirmer rétrospectivement, si nécessaire, mon appréciation d'alors). Donc la compagne de Bernard DESGRIPPES, que je ne crois pas avoir le grand avantage de connaître, refuserait de recevoir à leur domicile un "malotrus" de mon espèce.

Voici, on en conviendra, une information fort importante et à traiter comme telle, même si elle peut, selon les points de vue, sembler brute de décoffrage ou, au contraire, quelque peu réchauffée. De mon côté, on se doute que je suis toujours heureux de recevoir des leçons de politesse ou de maintien venant d'experts en ces matières, puisque, comme je le professe par ailleurs, il n'y a pas d'âge pour apprendre (par exemple, j'aimerais aussi savoir, tant qu'on évoque la bienséance, pourquoi l'auteur contemporain, dont je parle en introduction à ce billet, ne cite nulle part dans son ouvrage, non pas la dette énorme et évidente qu'il a à l'égard du dénommé LASSEUR, mais le nom seulement de ce dernier...).

Cette information paraît cependant refléter un certain état d'esprit déjà observé, à l'époque où j'avais encore plaisir à cotoyer l'auteur contemporain en question parmi des personnes que, désormais, j'évite volontiers. On aura compris qu'il s'agit là des jaloux, tout simplement, et plus particulièrement parmi ces derniers, de ceux qui sont en outre connus pour être friands de ragots et pour aimer par dessus tout essayer de se donner quelque importance en les colportant parmi leurs relations.

Bien entendu, chacun est libre d'interpréter cette affaire comme il l'entend. Quant à moi, il me semble que, si un visiteur du site pouvait aider à ce que ne soient pas bloquées, ici ou ailleurs, des documents éventuellement utiles, nous serions plusieurs à lui en être reconnaissants.
L'auteur contemporain que j'évoquais ici il y a une semaine avait fait passer des annonces sur eBay pour vendre des photographies anciennes de la Chaslerie. J'observe que ces annonces viennent juste de disparaître, sans que j'aie pu voir ces images. Quelle curieuse coïncidence, n'est-ce pas ?

Il est certes possible que ces lots aient subitement trouvé enchérisseur, alors qu'ils étaient en rade depuis trois mois. Mais il se trouve que toutes les annonces passées par le même collectionneur ont disparu concomitamment. Donc cette hypothèse paraît peu probable.

Serait-ce donc là une nouvelle contribution de ce recalé du suffrage universel à la diffusion de la connaissance de l'histoire du Domfrontais ?

On espère du moins que le procédé ne fasse pas école ou, pour être encore plus précis, que lui ne soit pas plagié.
Avant-hier, j'avais souhaité que le beau temps se maintienne suffisamment longtemps pour permettre à Pascal de trier des pierres sans creuser d'ornières avec les engins. Eh bien, c'est raté : Pascal n'a guère pu travailler hier, tant il pleuvait !

Je lui ai donc demandé de revenir restaurer la ferme, ce qui le mettra plus commodément à l'abri des intempéries, dès lors qu'il aura pris le soin de confectionner un parapluie :

Samedi 2 octobre 2010, la ferme vue du Sud-Est.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, la ferme en question a été inscrite à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques dès 1926 avec le reste du "village de la Chaslerie". A l'époque, l'administration ne faisait pas de détail et protégeait en outre sans barguiner les intérieurs autant que les extérieurs. C'est là un fait, corroboré notamment par les pièces préparatoires de l'arrêté de 1926 puis par l'attribution, voici douze ans, de subventions de l'Etat lors de la restauration de l'essentiel des couvertures de ce bâtiment. En 1794, cette ferme avait été vendue comme Bien National à une autre main que le manoir. J'ai eu l'opportunité de corriger cet état de fait, lourd de risques de problèmes de mitoyenneté, en achetant cette dépendance deux ans après le manoir.

Mais, depuis 1993 donc, je suis assez mal à l'aise avec ce bâtiment construit en trois phases (la partie la plus ancienne au milieu, avec de simples linteaux de chêne), tant j'en trouve ratée l'adjonction Sud, telle que bricolée au XXème siècle par des prédécesseurs, qu'on la regarde de l'Est comme sur la photo précédente, ou du Sud-Ouest comme sur la suivante :

Samedi 2 octobre 2010, la ferme vue du Sud-Ouest.

Vraiment, quelle idée saugrenue d'avoir conservé la même ligne de faîtage alors pourtant que l'on voulait, dans l'adjonction récente, un premier étage plus spacieux ! Depuis une cinquantaine d'années au moins, le rez-de-chaussée de cette adjonction était un salon, comportant une porte vers l'Est, et l'étage était occupé par deux chambres, l'une donnant à l'Est, l'autre à l'Ouest.

A ce stade de nos réflexions, trois solutions sont envisageables pour remédier à ce qui apparaît comme un hiatus :

- la première, correspondant à mes intuitions de départ, a été retenue par l'architecte Lucyna GAUTIER ; c'est donc celle qui a fait l'objet d'un permis de construire ; selon cette solution, on se contenterait de relever la ligne faîtière au niveau de cette seule adjonction. Cela imposerait des travaux assez lourds, puisqu'ils concerneraient deux murs pignons. Et, dans ce cas, la silhouette d'ensemble ne serait toujours pas, je le crains, très harmonieuse ;

- la deuxième consisterait à relever cette ligne faîtière également au-dessus des deux lucarnes qui donnent actuellement vers l'Est, c'est-à-dire sur près de la moitié de la longueur du bâtiment. Là, ce serait beaucoup plus coûteux, dans la mesure où les travaux affecteraient également une partie de la couverture encore en excellent état ; il faudrait alors retirer les tuiles correspondantes, scier la charpente, remonter deux murs pignon et un mur de refend, replacer enfin la charpente et la couverture. D'un point de vue esthétique, ce serait une solution convenable ; son principal avantage serait d'autoriser un volume confortablement habitable à la place du comble et de ses lucarnes, volume dans lequel on pourrait aménager deux belles salles d'eau et un dressing ;

- la troisième possibilité, qu'à la réflexion recommande Pascal, serait de conserver la ligne de faîtage telle qu'elle est, mais d'abaisser les sablières de l'adjonction Sud de manière à uniformiser la toiture d'un bout à l'autre du bâtiment, lui redonnant ainsi son aspect initial de longère ; outre qu'elle serait la moins coûteuse, cette solution serait esthétiquement inattaquable, mais l'habitabilité de la future "chambre des parents" (qui remplaçerait les deux chambres précédentes) serait sensiblement réduite. Il resterait cependant à décider alors le type d'ouvertures à substituer aux fenêtres du premier étage, mais c'est là un problème relativement secondaire.

Donc j'hésite toujours sur le parti à retenir. Aux dernières nouvelles, Walter, qui devrait être le principal concerné, pencherait pour la troisième solution, celle de Pascal.

Avant de prendre la décision finale, on peut toujours améliorer la situation du rez-de-chaussée, tant cette ferme appelle encore, à l'évidence, de travaux extérieurs. Nous allons donc commencer par restaurer les ouvertures du rez-de-chaussée de l'adjonction Sud :

Samedi 2 octobre 2010, un chantier, ça, Monsieur ? Non, Madame, une pataugeoire !

Il faut d'abord que Pascal bouche provisoirement en parpaings la porte de séparation entre la future cuisine (ancien salon) et le futur salon (ancienne pièce à vivre et cuisine). De la sorte, l'accès à ses outils sera protégé. Ensuite, il pourra intervenir sur les ouvertures de cette adjonction de la ferme qui ont été entourées, voici moins d'un siècle, de briques blanches de mauvaise qualité, de sorte que l'érosion y a déjà fait son œuvre. Il convient, à l'évidence, d'échanger ces briques contre des pierres d'angle en bon grès d'ici.

La photo suivante montre l'état actuel du pignon Sud de la ferme, volets arrachés et couverture soulevée par la tempête de 1999, fils téléphoniques posés dans d'horribles gaines de P.V.C. à même le mur, etc... Il est grand temps de reprendre les choses en main !

Samedi 2 octobre 2010,Le pignon Sud de la ferme avant travaux.

Nous allons donc commencer par remplacer la fenêtre Sud de la future cuisine (ancien salon) par une porte, selon les plans de Lucyna GAUTIER. Quant à la porte Sud-Est, nous lui substituerons une fenêtre qu'il conviendra de positionner en fonction de la longueur d'un ancien banc d'angle normand dont j'ai fait l'acquisition auprès de la maison LEMARIE et qui y est toujours en dépôt.

De la sorte, il y aura un accès direct à la cuisine lorsqu'on garera les véhicules le long de la façade Ouest de la ferme (c'est-à-dire hors du champ de vision du manoir). Et il sera plus commode, de la cuisine, de se rendre au fournil de la ferme qui pourra servir à terme de chambre d'amis ou de salle de jeux pour les futurs enfants de Walter.
Dans un bulletin de la Société Historique et Archéologique de l'Orne : Tome XLIII - publié en 1924, il est écrit :

"... Au-dessus de la petite porte, on remarque un cadran solaire portant le millésime de 1813 ... "

Ce cadran existe-t-il encore ?

Je suis membre de la Commission des cadrans Solaires de la Société Astronomique de France.

Mon site :

http://michel.lalos.free.fr/cadrans_solaires/index_cs.php

J'ai utilisé une photo du manoir et créé un lien vers votre site.

Merci
@ Michel LALOS :

Non, il n'y a pas de cadran solaire actuellement à la Chaslerie. Je n'en trouve aucune trace sur la façade Sud de la cour, au-dessus de la porte piétonnière, quand j'examine les plus anciennes photographies de la Chaslerie que je connaisse et qui datent du début du XXème siècle (voir la "Photothèque" du site). Ou alors "votre" cadran se trouvait dans la cour, au Sud du bâtiment Nord ; cette hypothèse paraît très vraisemblable, il aurait été installé là pour donner l'heure aux différents habitants du manoir, ceux du logis comme ceux de l'aile des écuries ; hélas, il n'y a pas non plus de trace là car ce bâtiment a été vigoureusement charcuté dans les années 1950 et percé alors d'étranges ouvertures carrées, maçonnées d'ailleurs avec des granites récupérés de pierres tombales...[img:500]2008_04_02 06 Chemineau Domfront, inscription "Chemineau Domfront" sur une pierre de la fenêtre Sud-Est, au 1er étage du bâtiment Nord.[/img]Je comprends donc que "votre" cadran solaire aurait fait les frais de cette campagne de travaux à l'initiative du père de mon vendeur. Voyez en effet la disposition et les proportions des fenêtres qu'il avait fait percer, l'une au-dessus d'une porte, et auxquelles j'ai préféré, à défaut de pouvoir les faire disparaître, faire subir une cure d'amaigrissement en 2008, en vue de leur donner des proportions moins incongrues :[img:500]2006_04_04 8,4 avril 2006, état des fenêtres sur cour du bâtiment Nord.[/img]Ceci dit, je vous avoue que je pensais faire installer un cadran solaire sur le mur pignon Sud de la ferme, au-dessus de la future porte de la cuisine, c'est-à-dire donnant vers le fournil.

Je suis en effet partisan d'inciter les visiteurs de la Chaslerie à regarder en l'air (cf les épis de faîtage, les boules de noblesse, les girouettes, la statue de Sainte Anne, etc..., toutes restaurations auxquelles j'ai procédé dans cet esprit), peut-être parce que, quand je marche, je regarde le plus souvent devant mes pieds. Cela m'a d'ailleurs valu de ne pas faire partie de la "garde du drapeau" de Polytechnique lorsque j'ai défilé sur les Champs-Elysées (en 1972, je pense). Et hier encore, prenant des photos dans la ferme de la Chaslerie, je me suis cogné deux fois sur une poutre, de sorte qu'aujourd'hui, j'ai le front déchiré par une plaie...

Pour en revenir à notre sujet, merci de m'avoir communiqué votre lien. Je vais le regarder tout de suite. Sur les cadrans solaires, j'avais déjà repéré, dans l'esprit que j'ai dit, les sites recommandés par un enseignant. Je suppose que vous les connaissez déjà.

P.S. 1 : Quand j'essaye d'accéder à votre site, l'ordi m'indique : "Erreur 500. Erreur interne du serveur" et la page reste blanche sous le logo de "Free". Je ne sais pas décrypter. Mais, grâce à Google, j'ai retrouvé votre site personnel. Je vois donc que nous sommes voisins. Pourquoi ne passeriez-vous pas un de ces jours à la Chaslerie ? Nous pourrions faire plus ample connaissance et vous accepteriez peut-être de me conseiller pour le cadran solaire que je projette (c'est le cas de le dire...) à la ferme.

P.S. 2 : Vous avez suscité un doute dans mon esprit. Il faudrait que je retrouve ma copie du cadastre napoléonien de la Chaslerie, qui est de la main de Nicolas GAUTIER, le précédent A.B.F. de l'Orne. Et si, en effet, la date de "votre" cadran solaire, soit 1813, était celle de la reconstruction du bâtiment Nord, à l'extérieur de la cour ? Encore une fois, ce site internet aurait manifesté son utilité pour faire ressurgir de vieilles informations...
Il va donc falloir déposer une demande d'autorisation préalable pour la restauration de l'allée principale.

C'est l'occasion d'évoquer ici les plans cadastraux dont je dispose à ce sujet. Pour la clarté de l'exposé, je vais partir du plus récent puis remonter dans le temps. (N.B. : la présente rédaction de ce message tient compte des découvertes que j'ai faites aux archives départementales de l'Orne le 25 novembre 2010, et dont je rends compte, sous l'onglet "Sujets divers", dans un message du 26 novembre 2010 ; en particulier, je m'interroge désormais sur la justesse des deux derniers plans ci-après).

Le plus récent a été préparé dans le cadre du remembrement de La Haute Chapelle qui était en cours lorsqu'en 1991, j'ai acheté la Chaslerie. Il est présenté ici de façon telle que "grosso modo", le Nord soit à gauche. Trois parcelles apparaissent sur cet extrait : en haut, celle du manoir (ZT 5), en bas celle de la ferme (ZT 2), à droite celle des agriculteurs les plus proches (géographiquement), actuellement les frères VINCENT (ZT 4).

Le plan cadastral lors du dernier remembrement.

C'est sur la base de ce plan que, dans le cadre de ce remembrement, l'essentiel des terres de la Chaslerie a été regroupé en une seule parcelle. En fait, ce plan n'est pas celui qui dit le droit actuellement ; il représente en effet ce qui serait advenu si ma voisine de l'époque, Jeannette LEVEQUE, n'avait pas renié sa parole en cours de remembrement (pour le détail de cette sale affaire, voir à l'onglet "Sujets divers", neuf messages mis en ligne en novembre 2010). On pourra noter qu'à l'intérieur de ces parcelles consécutives à une étape du remembrement (mais c'est également vrai sur le plan définitif où aurait dû être retracé le dernier avatar), toute trace de haie ou de fossé a disparu (même les douves, ce qui est un comble s'agissant d'un monument historique classé !). Est-il utile que j'indique que, de mon point de vue, ce plan, ainsi laminé, constitue de fait un encouragement à faire disparaître toute haie du bocage environnant, un "pousse-au-crime" bien inutile en l'état des mœurs de certains agriculteurs peu enclins, à l'évidence, à défendre la beauté des sites ?

Deuxièmement, le plan qui était en vigueur juste avant ce remembrement. Sur cet extrait, le Nord est en haut à gauche. Là, le géomètre avait encore respecté les limites des parcelles traditionnelles.

Cadastre en vigueur jusqu'au début des années 1990.

L'allée principale y était clairement représentée et l'on voit même que, curieusement pour qui a connu les lieux depuis quelques décennies, elle s'infléchissait sur la droite entre les anciennes parcelles 27 et 29, avant, semble-t-il de longer, au niveau de l'avant-cour du manoir, le mur de la chapelle au manoir. Ce plan avait en outre l'intérêt de représenter la charretterie dans son emprise d'origine (à côté du 12) ainsi que des bâtiments aujourd'hui démontés ou même disparus (en particulier le fournil de la cave, le bûcher de l'arrière-cour du manoir - près du 15 -, ou des granges diverses à proximité de la ferme). Ce plan montre également le circuit des douves dans son état des années 1950, avec l'arrivée de l'eau à l'angle Sud-Est des douves, une première sortie en limite Sud de la parcelle 9 et une sortie importante au Nord de la parcelle 8.

Troisièmement, voici un plan datant, semble-t-il, du milieu du XIXème siècle, tel que Nicolas GAUTIER l'avait copié je ne sais où :

Le plan cadastral qui devait être en vigueur dans la seconde moitié du XIXème siècle.

Sur l'allée principale, il ne nous apprend pas grand chose, sauf peut-être qu'avant de déboucher devant la cour du manoir, elle s'incurvait nettement dans l'avant-cour (où figurait une construction disparue - j'ai entendu parler d'une forge, on l'aperçoit d'ailleurs sur certaines cartes postales du début du XXème siècle, cf photothèque -). Ce plan du XIXème siècle nous montre surtout en quoi consistait alors le circuit des douves, avec un arrivée fraîchement creusée au Sud-Est du manoir ainsi q'une sorte de canal recourbé selon les lignes du terrain au Nord-Ouest. Je signale également que n'apparaît pas sur ce plan le bâtiment Nord, ce que semble contredire un témoignage reçu récemment en "Sujets divers" sur ce site internet (à propos d'un cadran solaire daté de 1815 et aujourd'hui disparu).

Quatrièmement, le plan dit "du cadastre napoléonien", copié ici par Nicolas GAUTIER sur l'original conservé aux archives départementales à Alençon :

Copie par Nicolas GAUTIER du plan dit "du cadastre napoléonien", datant en fait de 1824.

Si cette copie est exacte, la principale information que j'y découvre tient au fait qu'avant de franchir la douve Sud, l'allée principale passait entre deux petites parcelles qui me semblent témoigner de la présence très ancienne, à cet endroit, de deux pavillons d'entrée ou d'un châtelet. Apparemment, ces constructions avaient déjà disparu à l'époque de ce plan mais on en conservait encore la mémoire. Quant aux douves, l'on voit qu'il en restait un bout derrière la charretterie et l'on a confirmation de l'implantation de leur ancienne arrivée d'eau, un circuit que j'ai fait recreuser dès 1991.

P.S. du 26 novembre 2010 : il semble que la copie par Nicolas GAUTIER du "plan cadastral napoléonien" (en fait, plan de 1824) comporte des erreurs. Je signale que je donne aujourd'hui la bonne version de ce plan dans un message édité sous l'onglet "Sujets divers".
Torchis (1/) :

J'ai emprunté à la "Médiathèque" de Domfront, sur la vive recommandation de la bibliothécaire, un très intéressant ouvrage, "La terre crue en Basse-Normandie, de la matière à la manière de bâtir", édité par le "centre régional de culture ethnologique et technique de Basse-Normandie".

J'y découvre une foule d'informations, très bien présentées et illustrées, qui m'éviteront bien des erreurs quand nous avancerons dans la restauration de l'appentis de la cave et de la "maison de Toutou". Et l'on sait que nous nous apprêtons à passer à l'attaque !

D'abord, un point de vocabulaire que j'ignorais, de sorte que je mélangeais toutes sortes de notions. Je cite :

"Le pisé, terre généralement graveleuse compactée à l'état humide par petits lits successifs dans un coffrage, est fréquemment utilisée en Auvergne et dans la région Rhône-Alpes.

L'adobe, brique de terre mélangée éventuellement à des végétaux, moulée dans des moules en bois et simplement séchée avant d'être maçonnée, est utilisée principalement en Champagne et en région Midi-Pyrénées.

Le torchis, mélange de terre et de végétaux, employé à l'état plastique en remplissage d'une structure bois, est assez répandu sur la partie nord de la France, de la Bretagne à l'Alsace en passant par l'Ain. Cette technique a également été utilisée dans le Sud-Est.

Et enfin la bauge, mélange de terre et de végétaux manié également à l'état plastique sans coffrage pour réaliser des murs massifs et porteurs - à la différence du torchis - se rencontre principalement sur la partie ouest de la France, depuis l'Aquitaine jusque dans l'Avesnois, avec deux épicentres dans le bassin de Rennes et au coeur des massifs du Cotentin."

Le bâti en terre en France.

Je lis un peu plus loin : "Le sud de la Manche et l'ouest de l'Orne constituent une zone de construction à pans de bois et torchis où plusieurs techniques cohabitent : le lattis simple, le lattis double et les éclisses. L'Avranchin présente généralement des techniques plus sommaires - avec seulement quelques poteaux espacés visibles - que celles rencontrées dans les environs de Domfront où les pièces de bois sont plus resserrées."

Répartition du bâti en terre en Basse-Normandie.

Donc, c'est très clair : à la Chaslerie, c'est de torchis exclusivement que nous devons parler.

La composition de la terre est ensuite expliquée de façon très pratique, en mettant l'accent sur le rôle de l'eau et des minéraux argileux, puisque "ce qui différencie la terre d'un mortier classique c'est que sa fraction la plus fine, argileuse, se mêle à l'eau pour jouer un rôle de liant naturel entre les particules. Cette particularité explique que la terre a souvent été utilisée comme mortier, pour maçonner les murs en pierre, sans qu'on ait eu besoin d'ajouter d'autres liants tels que chaux ou ciment."

Ceci, à la Chaslerie, on l'avait bien compris : toutes les pierres des murs, jusqu'au XXè siècle, y ont été montées à l'argile, ni plus, ni moins.

Il est donc important de comprendre la proportion d'argile que contient la terre qu'on se propose de mettre en oeuvre. A cet effet, divers tests simples sont proposés :

- "On mord une pincée de terre et on l'écrase légèrement entre les dents. Si la terre est sableuse, elle crisse avec une sensation désagréable. Si la terre est silteuse, le crissement n'est pas désagréable. Enfin la terre est argileuse si l'on éprouve une sensation lisse ou farineuse."

- "Essai sensitif : Prendre une petite quantité de terre sèche et la frotter à sec dans la paume de la main : une sensation abrasive indiquera une forte présence de sable et de silt. Mouiller petit à petit la terre : si elle dégage une odeur, c'est qu'elle contient des éléments organiques. Laver la paume de la main à l'eau : si la terre se lave facilement et ne colle pas, la terre est sableuse ; si la terre colle et se lave difficilement, la terre est silteuse ; si la terre colle beaucoup, se nettoie difficilement en laissant des traces de coloration et une sensation 'savonneuse', la terre est argileuse."

- "Sédimentation : Dans un récipient transparent d'au moins 0,5 l, mettre 1 volume de terre débarrassée des éléments les plus grossiers et 3 volumes d'eau. Agiter vigoureusement le récipient fermé. Laisser décanter le mélange sur une surface horizontale pendant une heure. Agiter de nouveau le mélange et le laisser décanter. Mesurer huit heures après la hauteur du dépôt ainsi que les hauteurs des différentes couches de sédiments qui se sont déposés en fonction de leur gravité : les sables au fond, puis les silts et les argiles en couches supérieures (...)."

- "Test de résistance à sec : Mouler dans un cercle de plastique une pastille de terre de 3 cm de diamètre sur 1 cm d'épaisseur. Laisser sécher et observer le retrait par rapport au moule. Retrait et fissures sont le signe d'une terre riche en argile. Casser la pastille pour observer la résistance : difficile à casser avec un claquement à la rupture, la terre est argileuse ; difficile à casser mais sans trop d'effort avec possibilité de réduire en poudre entre pouce et index, la terre est sablo-argileuse ; facile à casser et à réduire en poudre, la terre est sableuse ou silteuse."

- "Test du cigare : Débarrasser l'échantillon des éléments grossiers. Mouiller et malaxer la terre de manière à obtenir une pâte homogène. Laisser la terre reposer 1/2 h au moins. Rouler la pâte de manière à obtenir un cigare de 3 cm de diamètre. Poser le cigare sur un plan horizontal et le faire avancer dans le vide jusqu'à sa rupture. Mesurer la longueur du morceau de cigare tombé. Recommencer le test plusieurs fois pour pouvoir valider le résultat : moins de 5 cm, la terre est très sableuse, plus de 15 cm, la terre est très argileuse ; entre 5 et 15 cm, la terre est sablo-argileuse."

Je vous encourage à réaliser ces tests comme nous allons nous y employer de notre côté, bien que je n'aie pas beaucoup de doute sur le caractère très argileux de la terre de la Chaslerie : il suffit de voir les retraits sur le sol de terre battue de la charretterie, alors pourtant que cette terre avait été mélangée à du gravier.

Je serai certainement amené à citer de nouveau ce remarquable ouvrage lorsque nous commencerons à compléter de torchis les colombages des deux dépendances de la cave que j'ai évoquées au début de ce message.
Inventaires révolutionnaires de la Chaslerie (1/2) :

En rangeant de vieux papiers, je retrouve des documents relatifs à la Chaslerie à l'époque de la Révolution.

Le premier indique les fermes de La Haute Chapelle qui étaient alors la propriété du dernier seigneur de la Chaslerie, Louis-Marie de VASSY, alors émigré :

Les terres à La Haute Chapelle du dernier seigneur de la Chaslerie avant la Révolution.

Le deuxième donne les noms, alors, des différentes pièces de terres dans les parages immédiats de la Chaslerie :

Les noms, juste avant la Révolution, des parcelles les plus proches de la Chaslerie.

C'est moi qui, aux archives départementales de l'Orne, ai recopié ces noms sur la copie dont je disposais du plan dit "cadastral napoléonien" (copie d'ailleurs inexacte comme je l'ai découvert le 25 novembre 2010, ainsi que relaté, sous cet onglet des "Sujets divers", dans un message du lendemain). Mon écriture est hélas peu lisible, même pour moi. Je déchiffre cependant, du Nord au Sud, les noms de parcelles suivants : le pré de l'herbage, le huteriau (lande), le huteriau (labour), le grand champ, le petit champ, la retenue, la pépinière, la saussaie (taillis), le ratouet, le jardin, le plant (pâture), la basse cour, le jardin du logis, la palissade, le canard (pré), la longe (pré), le champ de la pierre, le bout du pré (pâture), la barre (jardin), la barre (terre), le petit pré, le pré, la petite lande (lande), l'allée, le bois de la vallée (labour), le bois de la vallée (lande), la lande de l'allée (lande), le bignon (labour), la petite halousière (labour). Il faudrait cependant que je me renseigne sur le sens de certaines de ces appellations.

Les troisièmes sont les inventaires proprement dits des terres jouxtant le manoir, dressés en 1793 (les 26 et 28 prairial de l'an deuxième de la République Française). Ces documents ont été retranscrits, également aux archives départementales de l'Orne (où ils sont conservés sous la cote 1 Q 1020, liasse 42), en 1997 par Patrick DELAUNAY, alors président de l'"Association des amis du manoir de la Chaslerie". La "retenue de la Chaslerie" devait en effet être vendue comme bien national, et l'on dispose ainsi d'un recensement des principaux arbres de ces parcelles et des servitudes qui grevaient alors celles-ci :

L'inventaire révolutionnaire de la retenue de la Chaslerie en 1793.

L'inventaire révolutionnaire de la retenue de la Chaslerie en 1793.

L'inventaire révolutionnaire de la retenue de la Chaslerie en 1793.

Je relève là nombre d'informations dont plusieurs inédites :
- une description du logis ("Premièrement la maison manable") démontrant que le grand salon et la pièce au-dessus étaient chacun divisés en deux ;
- l'indication que le bâtiment Nord existait déjà (ce qui, soit dit en passant, semble contredire la copie par Nicolas GAUTIER du plan cadastral napoléonien, telle que mise en ligne, sous l'onglet "Journal du chantier" le 30 octobre dernier), avec des caves au rez-de-chaussée et des greniers au-dessus ;
- l'affirmation que le bassin monolithique au centre de la cour était alimenté en eau par des tuyaux le reliant à une source du Tertre Linot ;
- le fait que l'allée principale du manoir était qualifiée d'avenue et comportait "deux rangs d'arbre au couchant" sans que rien ne soit précisé pour le levant ;
- l'information que des bouleaux, des sapins et des sycomores étaient plantés à proximité du manoir ; que de nombreux arbres fruitiers avaient été plantés du côté de la ferme ainsi qu'à l'Est du manoir ; que de nombreux arbres adultes étaient présents aux alentours du manoir, 45 chênes, 6 hêtres et un orme ;
- la description de la ferme comportant la demeure du fermier, alors dénommé SELLIER, et, à son extrêmité (sans doute au Nord), une cave avec un "toît à porc et grenier dessus", ainsi que des trois dépendances de la ferme, à savoir deux granges (aujourd'hui disparues mais dont on conserve la photo, cf la "photothèque" du site) et le fournil dont les maçonneries ont été restaurées en 2010 ;
- la certitude qu'il y avait alors un ancien étang à l'Est du manoir, ce dont je me doutais en raison de la topographie et de la présence de nombreux ajoncs, sans en avoir encore trouvé la preuve.
Lors de ma visite, hier, aux archives départementales de l'Orne, j'ai pu discuter avec M. Jean-Claude MARTIN, qui y est chef de service, et nous avons évoqué la possibilité qu'un étudiant de Caen consacre une année d'études à trier les documents relatifs aux LEDIN dans ses dépôts où ils demeurent souvent inexploités.

J'ai pu "capter" sur écran et faire imprimer des extraits du document que l'on appelle abusivement "cadastre napoléonien" car il date en fait de 1824.

Voici d'abord une vue d'ensemble de la partie de la "section A de la Renaudière" où figure la Chaslerie :

Extrait du "cadastre napoléonien" de 1824.

Ce premier extrait nous apporte les informations suivantes, relatives à la Chaslerie en 1824 :

- la douve franchissait alors ce que j'appelle "l'allée principale" (et que les inventaires révolutionnaires qualifient plus justement d'"avenue" ; dorénavant, je parlerai donc, moi aussi, d'avenue) ; cette avenue tournait au bout d'environ 500 mètres vers le Tertre Linot et le bourg de La Haute Chapelle, comme c'est toujours le cas aujourd'hui ;

- au fond de la cour du manoir, le bâtiment Nord se trouvait déjà à l'emplacement que nous lui connaissons ; ceci corrobore l'idée qu'il aurait été édifié ou réédifié en 1815, ainsi qu'un visiteur du site, spécialiste de cadrans solaires, nous l'a appris ici le 3 octobre dernier ;

- le canal d'alimentation des douves suivait le parcours que j'ai rétabli en 1991, notamment au niveau de l'arrivée dans les douves ; en revanche, le canal de sortie partait de plus à l'Ouest qu'actuellement (ceci témoigne du caractère relativement récent du bief aval actuel ; le fait est que la maçonnerie est d'un tout autre appareil que le mur d'escarpe, manifestement beaucoup plus ancien) ; il n'y avait pas de canal vers le Nord, parallèle au Beaudouët, contrairement à ce qu'a retranscrit Nicolas GAUTIER il y a une bonne quinzaine d'années (voir mon message du 30 octobre dernier sous l'onglet "Journal du chantier" ; je me demande donc où Nicolas avait trouvé le plan qu'il avait alors copié, à moins qu'il n'y ait eu erreur de sa part, ce qui paraîtrait surprenant ; il y a un mystère pour moi là-dessous...) ;

- dans l'arrière-cour, il y avait deux petites constructions accolées au mur qui va du manoir au fournil ; or, je me suis toujours demandé d'où venaient les deux niches rectangulaires que l'on aperçoit du côté Est de ce mur : ce sont très certainement les traces de fenêtres de ces petits bâtiments ;

- sur la cave, un appentis était accolé côté Nord-Est ; le fait est qu'il en reste la cicatrice, un désordre dans la maçonnerie à l'angle Nord-Est de la cave ; je m'étais toujours demandé la raison de ce désordre ; elle est donc trouvée ; comme je n'avais pas su interpréter cette bizarreté, j'ai fait restaurer, il y a une quinzaine d'années, l'appentis de la cave côté Ouest ; je souhaitais en effet qu'il ne soit pas visible de l'avant-cour ; en outre, je voulais percer deux petites ouvertures sur le pignon Est de ce bâtiment, ce qui fut fait ;

- du côté de la ferme, on aperçoit bien le fournil ; en revanche, on lit que l'extension Sud n'avait pas du tout la forme que nous lui connaissons aujourd'hui ; ce n'était pas davantage un prolongement de la longère ; à l'arrière de la longère, côté Ouest, il y avait un appentis ; c'est là que mes prédécesseurs avaient édifié l'affreux garage en parpaings et schingle que j'ai évidemment fait raser ;

- en ce qui concerne les dépendances en colombages, on ne voit sur ce plan trace ni d'un édicule dans l'avant-cour (la forge ?), ni de la porcherie dans l'arrière-cour (que j'ai fait démonter peu après 1991, tant elle était en mauvais état), ni de diverses granges autour de la ferme, dont témoignent le plan cadastral en vigueur vers 1950 et de vieilles photos ; en revanche, la grange à l'Ouest du manoir était déjà là (j'ai dû la faire démonter dès 1991, elle aussi était en trop mauvais état pour être restaurée directement).

Sur ce même plan (les extraits suivants ne sont pas à la même échelle que le précédent, ceci par les mystères de la technique...), je relève également que :

- à la Renaudière, il y avait des douves, une sorte de Pournouët bis ; il faudra que j'aille me promener par là-bas pour voir ce qu'il en reste désormais :

La Renaudière en 1824.


- à la Foucherie, il y avait également, semble-t-il, en 1824, des traces de pièce d'eau ; il faudra que je retourne voir les frères BAGLIN pour tâcher de retrouver l'emplacement de cette pièce d'eau ; à la Foucherie aussi, on voit que l'un des bâtiments présents en 1824 était une grange que j'ai fait démonter, il y a une douzaine d'années, pour en récupérer les pierres :

La Foucherie en 1824.


- à la Thierrière (la maison de la mère de Maxime), le bâtiment le plus important était en 1824 la grange que j'ai aussi fait démonter, celui-ci l'an dernier, pour en récupérer les pierres et quelques bois de charpente :

4 janvier 2009, la grange dont la mère de Maxime m'a vendu les pierres et la charpente.

4 janvier 2009, la grange de la Thierrière en cours de démontage.

Pour terminer ce message, je voudrais donner une bonne nouvelle à tous ceux qui s'intéressent aux vieux papiers sur La Haute Chapelle : les photos de plans qui illustrent ce message sont de mauvaise qualité, c'est moi qui les ai prises hier ; elles sont en outre limitées dans leur champ ; or, le plan de 1824 devrait être directement accessible en ligne, dans son intégralité, d'ici un mois environ. C'est en tout cas ce qu'on m'a dit hier à Alençon.
Voyons en quoi a consisté ma récolte aux archives départementales de l'Orne, en plus du plan cadastral de 1824 que j'ai déjà commenté hier matin.

J'ai trouvé les documents archivés sous la cote 1Q 1020 liasse 42, c'est-à-dire les inventaires des biens immeubles (documents dont je fournis ici la photo des premières pages) :

- de la "retenüe de la Châlerie", "provenant de l'Emigré Vassy bressé", en 6 pages :

Inventaire révolutionnaire de la "retenüe de la Châlerie".

- de la "ferme de la Châllerie", en 6 pages :

Inventaire révolutionnaire de la "ferme de la Châllerie".

- de la "prairie de la Châlerie", de "l'Emigré Vassi", en 6 pages :

Inventaire révolutionnaire de la "prairie de la Châlerie".

- de la "ferme de la Tierrière (...) appartenante cy-devant à l'Emigré Vassy (...) faitte valloir par Loüis Blanchetierre", en 4 pages :

Inventaire révolutionnaire de la "ferme de la Tierrière".

- de la "ferme de la Guerche (...) louée par l'émigré Vassi", en 6 pages de très mauvaise qualité et qui ont bu l'encre ::

Inventaire révolutionnaire de la "ferme de la Guerche".

- de la "ferme du Tertre Linot (...) provenant de l'Emigré Vassi et loüée avec la ferme de la Guerche aux citoïens Sablerie (?)", en 4 pages ::

Inventaire révolutionnaire de la "ferme du Tertre Linot".

- de la "ferme de la Guiardiére (...) appartenante cy-devant à l'Emigré Vassy de Bressey et faite valloir par le citoïen Jean Grippon" (sic, sans doute un ancêtre de Roger GRIPPON qui a exploité cette ferme jusqu'à ces derniers mois...), en 12 pages ::

Inventaire révolutionnaire de la "ferme de la Guiardiére".

- de la ferme du "Bois Tillard (...) provenant de l'Emigré Vassi Bressé et louée à Siméon le Sellier", en 6 pages :

Inventaire révolutionnaire de la ferme du "Bois Tillard".

Bien entendu, je tiens les photos de toutes ces pages à la disposition de ceux qui me les demanderaient (je les enverrais par courriel).

A signaler que les transcriptions des trois premiers documents ont été fournies ici, dans un message du 21 novembre dernier.

Lors d'une prochaine intervention, je traiterai des inventaires des biens meubles.
Les archives départementales de l'Orne conservent, sous la cote 1 Q 1052, deux inventaires révolutionnaires des biens meubles de la Chaslerie.

Le premier document est un constat établi à la suite d'une dénonciation. Voici la photo de la première des cinq pages de ce document, écrit sur un papier timbré de la fleur de lys entourée de l'inscription "La Loi" :

Première page de l'inventaire du 5 août 1792".

Et voici sa transcription :

Le second document est un inventaire du 15 septembre 1792, dressé en vue d'une "vendue" :

Et voici sa transcription :

Je retiens que, selon ces deux documents, il ne restait plus de meubles de valeur à la Chaslerie dès cette époque, à l'exception peut-être des ornements de la chapelle.

Je remarque également que le fermier GOUPIL qui occupait alors le manoir avait une belle signature, témoignant de son instruction.
Ce matin, dans le prolongement de mon premier message du 26 novembre, je suis allé me promener à La Haute Chapelle pour voir si je retrouvais la trace des douves indiquées chez des voisins sur le plan cadastral de 1824.

D'abord à la Foucherie :

29 novembre 2010, le manoir de la Foucherie à La Haute Chapelle.

J'aime beaucoup l'élégante échauguette de ce manoir :

29 novembre 2010, l'échauguette du manoir de la Foucherie.

Patrick et Michel BAGLIN m'ont très aimablement accueilli et offert l'apéritif :

29 novembre 2010, les frères BAGLIN devant la Foucherie.

Avec Patrick, je suis allé voir où étaient les douves, derrière le manoir. En fait, elles ont disparu il y a longtemps. Patrick m'a indiqué que, dans son enfance, la trace en était encore visible grâce à une ligne de peupliers. Il y avait aussi, là, de vieilles pales de moulin, en bois. Mais il a fallu faire place nette pour construire un bâtiment agricole.

J'ai ensuite poussé jusqu'à la Renaudière. Je n'y ai trouvé personne. J'ai cependant jeté un coup d'oeil à l'arrière du bâtiment. Là encore, les douves se sont en quelque sorte fondues dans le paysage. Il semble qu'elles aient été remplacées par une clôture de barbelés.
A propos de l'écu des LEDIN, je vais vous conter une histoire authentique qui démontre qu'il peut même exister une vraie coopération entre les propriétaires successifs de la Chaslerie pour en favoriser la restauration et l'embellissement.

L'histoire commence en 1954. Jean DURAND de SAINT-FRONT écrivit au propriétaire à l'époque du manoir, Henri LEVEQUE, afin de lui signaler qu'une personne un peu timide avait des choses intéressantes à lui apprendre. Voici ce courrier :

Lettre du 16 novembre 1954 de Jean DURAND de SAINT-FRONT à Henri LEVEQUE.

Lettre du 16 novembre 1954 de Jean DURAND de SAINT-FRONT à Henri LEVEQUE.

"Beaucoup de patience et de diplomatie", c'est donc ce qu'il fallait, d'après Jean DURAND de SAINT-FRONT pour récupérer une de ces taques (c'est le nom exact de ces plaques de fonte).

Effectivement, Georges LEPAGE envoya quelques jours plus tard à Henri LEVEQUE la lettre suivante, à laquelle était joint le dessin remarquable d'une des taques en cause :

Lettre du 19 novembre 1954 de Georges LEPAGE à Henri LEVEQUE.

Lettre du 19 novembre 1954 de Georges LEPAGE à Henri LEVEQUE.

Lettre du 19 novembre 1954 de Georges LEPAGE à Henri LEVEQUE.

Dessin joint à la lettre du 19 novembre 1954 de Georges LEPAGE à Henri LEVEQUE.

J'ai trouvé les documents qui précèdent dans un dossier laissé en évidence par mon vendeur ou son épouse lorsque j'ai pris possession de la Chaslerie, un jour de juin 1991.

Bien évidemment, je n'ai pas tardé à me mettre en quête de l'une de ces taques, d'autant que, très rapidement, j'avais fait - je ne sais plus comment - la connaissance de Mme Yvette RIVARD, de Rânes. Le fait est qu'alors que j'avais été à l'initiative de la fondation en décembre 1991 de l'association des "Amis du manoir de la Chaslerie", le conseil d'administration de cette association nomma, dès mars 1992, Mme RIVARD "membre d'honneur de l'association (...) pour avoir aidé à repérer deux anciennes taques de la Chaslerie".

Je me souviens avoir vu celle du prêtre, représentée sur le dessin de Georges LEPAGE, dans le bourg de Rânes, chez un ancien pharmacien amateur de vieux vitraux ; celle-ci ne m'intéressait guère, en raison de l'inscription sans rapport avec la Chaslerie qui surchargeait la "fasce" de l'écu.

Quant à l'autre taque, elle se trouvait sous une grange, chez un agriculteur des environs de Rânes. Malheureusement, elle était fêlée. J'entrai immédiatement en négociation mais, très vite, la discussion achoppa car je trouvais le vendeur trop gourmand. Pour moi, l'affaire était close.

Mais, sans que je le sache, avec "beaucoup de patience et de diplomatie" comme on la connaît, Carole reprit langue avec cet agriculteur et, lors de la fête des pères suivante, elle put me faire la surprise de m'offrir ladite taque. Celle-ci trône donc désormais dans la grande cheminée du manoir :

2 décembre 2010, la taque aux armes des LEDIN.

Malheureusement, depuis 1992, sa fêlure s'est propagée sous l'effet de la chaleur des flammes et il serait grand temps de prendre un moulage de l'original pour n'exposer au feu de l'âtre qu'une copie. Si d'ailleurs un visiteur du site a des idées en la matière, ou des suggestions d'artisan à qui confier ce travail, elles sont les bienvenues.

L'histoire ne s'arrête pas là. Un point avait en effet échappé au vigilant Georges LEPAGE ; ni sa lettre, ni son dessin n'en portent trace.

Revenez donc sur la photo de la taque. Observez-la bien. En réalité, l'écu des LEDIN porte dans ses coins des protubérances bizarres. En outre, cet écu est un peu sous-dimensionné par rapport au support sur lequel il a donc été cloué selon moi. Il semble en effet que le fondeur de la taque ait disposé d'une matrice avec les deux lions, le heaume de chevalier, etc... et qu'il y ait cloué l'écu des LEDIN afin de constituer le moule utilisé pour y couler la fonte.

Mon interprétation vous semble peut-être tirée par les cheveux. Mais j'ai trouvé, figurez-vous, un argument que je pense imparable : au logis de Sainte-Marie-la-Robert, près de Carrouges, j'ai vu dans la cheminée principale de ce château antérieur à la Chaslerie une taque en tous points semblable à la mienne, à l'écu près.

Je pense qu'on peut conclure que, dès le XVIIIème siècle, le fondeur de Rânes avait industrialisé sa production pour orner les logis de ses clients, les chevaliers normands.

CQFD
Selon moi, une bonne compréhension de l'histoire d'un monument historique est le préalable nécessaire d'une restauration menée dans un bon esprit. C'est ce que j'essaye de faire comprendre à mes fils, et notamment à mon aîné qui voudrait percer de nouvelles ouvertures sur la cave, au risque, à mon sens, de la dénaturer durablement et, peut-être, irréversiblement. Thibaud me fait cependant valoir qu'il entend seulement mettre en application le permis de construire que j'avais moi-même obtenu, sur la base de plans que j'avais approuvés il y a une quinzaine d'années.

Corrélativement, le fait de se livrer, consciemment ou non, à une relecture biaisée de l'histoire, voire à sa dénaturation pure et simple, est une mauvaise façon, certainement, de se mettre en position d'entreprendre des travaux judicieux et qui respectent "l'esprit des lieux". C'est ce que je voudrais expliquer maintenant en prenant pour exemples les travaux effectués à la Chaslerie vers le milieu du siècle dernier. Ce sera là l'objet de mes plus prochains messages sous cet onglet. Car il y a un continuum entre les événements extérieurs qui s'imposent au bâtiment et la qualité des soins dont il a pu faire l'objet à travers les siècles. Et, si l'on déchire le tissu de l'Histoire, il y a de grandes chances qu'on martyrise aussi les vieilles pierres.

Bien sûr, d'autres facteurs doivent être pris en considération pour relativiser ce qui, aujourd'hui, peut apparaître le plus raté sous nos yeux. On a d'ailleurs compris que le niveau d'exigence peut se durcir avec le temps, comme dans mon cas depuis que j'ai acquis le manoir (même si j'ai toujours été négatif à propos de la frénésie de percement d'ouvertures qui semble s'être abattue sur la Chaslerie pour en crever les façades vers 1950). De même, les travaux que nous menons nous-mêmes aujourd'hui, s'ils n'appellent pas encore de critiques trop vives de la part des visiteurs, pourraient fort bien, vers 2070 ou même avant, sembler avoir constitué un gaspillage invraisemblable de moyens qui eussent pu être investis de façon plus judicieuse ailleurs. Par exemple, j'ai déjà entendu, il y a deux ou trois jours à peine, un agriculteur remembreur d'une commune voisine me dire que, dans le pays, certains s'étonnaient que l'"on" puisse consacrer autant d'argent à la restauration du manoir de la Chaslerie alors que la dynamique association constituée autour de l'église Saint Julien de Domfront peinerait à trouver des fonds pour en restaurer le clocher. Il y a donc pour le moins, reconnaissons-le, des points de vue divers.

Du point de vue où je me place et avant de porter, par exemple, un jugement que je souhaiterais éclairé sur la qualité des travaux de restauration menés à la Chaslerie au milieu du siècle dernier, j'admets fort bien que doivent être pris en compte un certain nombre de facteurs comme :
- la dureté des temps (on sortait alors d'un conflit mondial),
- des contraintes humaines (comme l'emprise qu'on nous a prétendue trop longue d'un mauvais "régisseur"),
- la variation des modes (il faudrait consacrer un jour un ouvrage entier à disséquer la mauvaise influence de certaines revues dites de décoration sur tant de ménagères un peu naïves),
- le progrès des techniques (qui utiliserait encore du fibro-ciment à base d'amiante pour restaurer des plafonds ?)
- l'urgence, car il s'agissait de rendre habitable des volumes qui avaient brûlé et de loger des personnes déjà âgées lorsqu'elles se sont enfin trouvées en position d'entreprendre des travaux ;
- etc...

Je suis prêt à entendre tous ces arguments.

Pour autant, cela ne me rend pas aveugle.
Dans sa réponse à Henri PELLERIN mise en ligne ici le 8 décembre dernier (3ème message de ce jour-là), Henri LEVEQUE écrivait qu'en 1956, il était propriétaire de la Chaslerie depuis 4 ans et n'avait achevé que la première tranche de travaux sur "les six qui sont nécessaires pour redonner à cette vieille demeure le lustre qu'elle a eu et mérite de retrouver."

On a également vu ici, le 9 décembre dernier, qu'Henri LEVEQUE écrivait volontiers les brouillons de ses textes sur des bouts de papier récupérés à droite ou à gauche. C'est ainsi qu'il prépara un exposé devant un fonctionnaire chargé du patrimoine à une date postérieure au 19 juillet 1954. Examinons ce document qui nous donne des indications sur les 6 tranches de travaux en question :

Brouillon d'Henti LEVEQUE, recto de la 1ère page.

Brouillon d'Henti LEVEQUE, verso de la 1ère page.

Brouillon d'Henti LEVEQUE, recto de la 2ème page.

Je n'arrive pas à déchiffrer tous les mots de la fin de ce texte mais cela donne à peu près ceci :
"Un très gros effort a été fait par le propriétaire actuel en particulier
1) pour réparer erreurs
2) pour assainir sol et éviter deter.(=détériorations) qui s'aggravaient par les eaux
3) récupération de matériaux d'époque utilisés à un remploi judicieux"

J'interromps ma retranscription ici, pour commenter ce début de texte. On lit qu'Henri LEVEQUE parle de lui à la troisième personne du singulier, ce qui paraît curieux. Etait-ce une habitude chez lui ? Ou bien le discours qu'il préparait devait-il être tenu par un tiers, censé défendre la cause de ce conseiller général devant l'administration ? De plus, avec ce que l'on sait de la récupération de pierres tombales pour percer d'horribles fenêtres sur le bâtiment Nord, est-ce de cela qu'il s'agissait lorsqu'il parlait de "matériaux d'époque utilisés à un remploi judicieux", ou bien de la grande cheminée de la salle à manger du logis que j'ai évoquée ici dans mon message du 4 avril 2010 ?

Je reprends ma retranscription :
"Il est incontestable qu'il reste des travaux à faire pour (donn = donner, un mot rayé) compléter un ensemble d'une réelle valeur historique. Le propriétaire (qui est, 2 mots rayés) serait très attaché (ainsi que, 2 mots rayés) à continuer."

Les mentions rayées sont amusantes, l'une pour corriger un excès de contentement de soi, l'autre, apparemment, pour revendiquer la paternité exclusive des travaux à venir...

Je poursuis :
"- fenêtres côté Renaissance
- (3 mots rayés : pas de ?)
- toit baissé (par rapport au, 3 mots rayés) après (depuis, 1 mot rayé) l'incendie de 1884
- Douves parterre terrasse
- Démolition bat. (= bâtiment) rural
. avenue ds (=dans) l'axe du porche
déviation chem. (=chemin) exploit. (=d'exploitation)
. 1ère cour
. mur séparatif de la terrasse (du parterre, 2 mots rayés)
. fermeture du bout (? mots illisibles)
- mur soutien terrasse
- chapelle
(? un mot illisible) plus
avant-cour"

On comprend, à travers ces dernières lignes, que les jours du pressoir (la charretterie actuelle, au Sud de l'avant-cour) étaient comptés en vue de placer l'avenue dans l'axe du porche. C'est donc Henri LEVEQUE qui avait décidé l'abandon de ce bâtiment (d'où son état lamentable en 1991, lorsque j'ai acheté la Chaslerie) pour pouvoir rectifier l'avenue qui s'incurvait alors (voir le dernier plan cadastral avant le dernier remembrement) pour venir frôler la chapelle. On peut comprendre que c'est donc lui qui a également fait combler la pièce d'eau de l'avant-cour.

Pour le reste, il ne devait pas être satisfait de la couverture du logis postérieure à l'incendie de 1884 et désirait, semble-t-il, restaurer tous les murs qui tombaient déjà en ruine (maudit régisseur !) entre les cours, la terrasse et ce qu'il appelait "le parterre" (et que j'appelle le Pournouët), y compris le "mur soutien terrasse" (que je préfère dénommer le mur d'escarpe).

Mais quel dommage qu'il ne s'en soit pas tenu à ce programme qui, mis à part le mauvais sort fait au pressoir, apparaissait raisonnable ! Car nous allons montrer à quoi l'on aboutissait quand ce "chef d'orchestre" (comme il se définissait donc) prenait la baguette...