Désultoirement vôtre !

Pierre-Paul FOURCADE
rédigé le Jeudi 19 Octobre 2017
Désultoirement vôtre ! - Archives, histoire, documentation - Généalogie et sagas familiales
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Je viens d'échanger une série de S.M.S. avec l'archiviste que j'ai mandaté pour essayer d'éclairer certaines zones d'ombre de l'histoire de notre manoir favori.

Apparemment, il a trouvé des détails que j'ignorais sur l'évolution de la propriété au début du XIXème siècle.

Je mettrai en ligne ces informations dès que j'en disposerai. Peut-être cela permettra-t-il à des tiers d'intervenir pour corriger, le cas échéant, des conclusions qui leur paraitraient trop hâtives. C'est en tout cas ce que je me dis, persuadé qu'une fois de plus, notre site favori peut jouer un rôle précieux en la matière.
J'aime la Normandie (via Facebook)
rédigé le Jeudi 19 Octobre 2017
Désultoirement vôtre ! - Archives, histoire, documentation - Références culturelles
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N.D.L.R. : Je serais très intéressé de savoir où se trouve ce manoir que je ne connais pas. Le tympan de la porte d'entrée semble en effet du même modèle que celui de notre manoir favori, ainsi que de deux ou trois manoirs voisins. On dirait que tous sont dus au ciseau du même artisan, intervenant donc vers 1598.

P.S. du 14 mars 2018 : La réponse n'a pas tardé.

P.S. : Je suppose que, face à un personnel administraaaâââtif qui est peut-être aussi convaincu que moi de l'absurdité de sa tâche et de ses méthodes, d'aucuns trouveront le style de mes imprécations excessivement virulent. Ou même mon attitude contre-productive. Affaire de goût. Moi, comme l'on sait, j'en ai ma claque de l'envahissement bureaucratique que l'on constate trop souvent dans ce pays et j'essaye, à ma façon et à mon échelle, d'y mettre le hola car cela me semble nécessaire même si, à vrai dire et vue de ma fenêtre, la tâche paraît impossible.

Au demeurant, il est de fait qu'on m'a souvent attribué un "sens aigu de la justice" (que l'on peut discuter ou dont on peut certes contester les points auxquels il s'attache), ainsi que le faisait remarquer en salle des profs un collègue de ma mère dont le fils était mon condisciple en classe de 4ème, je crois. A l'âge de 12 ans donc, j'avais en effet protesté publiquement contre le fait que le conseil de classe laisse passer ce garçon en classe supérieure, alors qu'avait été recalé un autre de nos camarades qui me paraissait plus méritant.

Avec tout cela, il est clair que je m'étais fourvoyé en tentant une carrière dans cette foutue administraaaâââtion que nous savons. Mais ceci est une autre histoire, dont je débite quelques tranches ici à l'occasion.
This 112-sheet manuscript includes depictions of contestants equipped for various tournaments. The illustrations are probably the work of a Briefmaler, or letter painter, who also would have written and embellished official documents and painted coats-of-arms.

Featured Artwork of the Day: Album of Tournaments and Parades in Nuremberg | late 16th–mid-17th century | German :

N.D.L.R. : Contemporain de la Chaslerie.
Le château de Gudanes était en vente lorsque j'ai acheté la Chaslerie. L'n des propriétaires précédents avait été surnommé le "roi des Pyrénées", ce qui ne m'effarouchait nullement. Beaucoup d'allure mais aussi beaucoup trop de verrues ingérables sur l'arrière du bâtiment. Et, bien sûr, c'était trop loin de Paris. J'observe cependant sa restauration sur internet. Voici, par exemple, un décor de plafond qui ne déparerait pas dans la salle-à-manger de notre manoir favori :

Today in 1618: Sir Walter Raleigh is executed.

Raleigh is best known as an explorer and a favourite courtier of Elizabeth I. He was knighted and appointed captain of the Queen's Guard in 1587. However, Raleigh’s secret marriage to one of the Queen’s maids-of-honour Elizabeth Throckmorton angered the queen and both were imprisoned in the Tower of London. When James I took the throne in 1603, Raleigh was far from a favourite, and, after being implicated in a plot against the King, found himself once more in the Tower – this time for 13 years, held in the Bloody Tower. He was released to lead an expedition to El Dorado, but its failure led to his arrest and death sentence.

Image: The lower chamber in the Bloody Tower, reconstructed as Sir Walter Ralegh's Study :

N.D.L.R. : Contemporain de la Chaslerie.
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L'affaire de l'arbre de la liberté

Le 6 mars 1794, pardon, "le 16 ventôse l'an 2e de la République française une et indivisible", sur les neuf heures du soir, c'est l'effervescence dans le bourg d'Aucun : un malfaisant a abattu l'arbre de la liberté !

Les faits

Pierre Pujos, Mathieu Garcie et Jean Massot se rendent sur les lieux du méfait. L'arbre, planté à proximité de la maison commune, a été scié à trois pans au-dessus du sol (environ 65 centimètres) et s'est cassé en deux dans sa chute.

Le maire, l'officier municipal et l'agent national font le tour du bourg à la recherche du ou des coupables, sans grand succès (il doit faire nuit noire à cette heure tardive), et décident de mettre les morceaux de l'arbre à l'abri, avant de rédiger un procès-verbal. Ils ne veulent surtout pas être accusés à tort.

Une semaine plus tard, le 13 mars, le comité de surveillance d'Argelès (aujourd'hui Argelès-Gazost) pointe deux noms : François Bergant et Jean Labernèze sont en fuite, c'est bien la preuve qu'ils sont coupables ! Deux gendarmes sont dépêchés pour les arrêter, mais ils ont beau faire le tour des maisons et visiter les granges… ils font chou blanc.

L'agent national Jean Massot s'impatiente. Flairant la menace, André Cazajous, qui fut le premier maire élu d'Aucun en janvier 1790 et dont l'épouse est une certaine Jeanne Bergant, se présente à la maison commune le 26 mars à midi : il n'a pas vu François Bergant, "cadet de la maison", depuis le 3 mars dernier. Il ne lui a pas parlé depuis lors et il ignore où il se cache.

Il déclare en outre que "tous les citoyens de la commune d'Aucun sont instruits savamment qu'il n'a jamais été son supérieur" et "il demande que la présente déclaration soit couchée sur le registre en cas de besoin". En ces temps troublés, il importe de se méfier des dénonciations, elles pourraient rapidement avoir des conséquences plus que fâcheuses…

On fait bientôt donner la garde nationale. Le 29 mars, à huit heures du soir, instruits par la rumeur, une dizaine d'hommes se rendent de l'autre côté du gave d'Azun, au hameau de Terre Nère, à la recherche de Jean Labernèze. Ils perquisitionnent les maisons Labernèze, Lacabane, Rousse, Bouic, "fouillent dans tous les coins de leurs bâtiments", en vain.

Deux jours plus tard, ils se transportent dans la section de Labat, à la recherche de François Bergant. Cette fois, les perquisitions s'effectuent chez Peinougué, Carrieu, Lacontre, Artigalets. Sans plus de succès.

Mais bientôt, la municipalité a d'autres sujets de préoccupation, nomination des instituteurs, question religieuse, réquisitions diverses, et il n'est plus question de l'affaire dans le registre des actes communaux. Peut-être faudrait-il consulter les archives du comité de surveillance d'Argelès pour connaître le mot de la fin, c'est malheureusement un peu loin de mon camp de base.

Les protagonistes

J'ai néanmoins tenté d'en apprendre davantage sur les deux suspects. En l'absence de registres d'état civil numérisés pour la période comprise entre 1790 et fin 1802, j'ai consulté les sites de Geneanet et de Filae.

J'ai facilement identifié Jean Labernèze. Je savais déjà qu'il était charpentier (c'est peut-être lui qui a manié la scie ?). Je découvre qu'il a vingt-six ans au moment des faits et qu'il s'est marié l'année précédente. Le voilà donc en cavale.

J'ai plus de difficultés avec François Bergant qui ne semble pas avoir intéressé beaucoup de généalogistes jusqu'à présent. Peut-être s'agit-il d'un beau-frère d'André Cazajous, puisqu'il semble plus ou moins attaché à sa maison, mais je ne puis rien affirmer.

Rappel historique

Les arbres de la liberté, le plus souvent des chênes ou des peupliers, ont repris la coutume plus ancienne des arbres de mai, destinés à fêter l'arrivée du printemps.

Plantation d'un arbre de la liberté à Paris - Source Gallica.bnf.fr

Le premier aurait été planté en mai 1790 par le curé de Saint-Gaudent, dans le département de la Vienne, qui lança ainsi une mode. En 1792, on en comptait plus de 60 000 dans tout le pays, ornés de rubans ou de cocardes tricolores et parfois coiffés d'un bonnet phrygien.


Symbole républicain qui fut souvent déraciné durant la Restauration, s'il n'avait pas dépéri auparavant… mais savez-vous qu'il subsiste toujours à l'avers des pièces françaises de un et de deux euros ?
Renaud Camus, écrivain des crépuscules

Renaud CAMUS

On se trouve devant la centaine de volumes publiés par Renaud Camus – journaux intimes, romans, essais politiques, abécédaires, mélanges – comme l’alpiniste devant certaines montagnes : l’œuvre est si riche de sujets, de genres, de tons qu’elle intimide, si tendue par un style unique, ferme et ferré, qu’elle force à l’humilité. – En désespoir de cause, on prend au hasard un de ces livres, en pensant qu’on en dira assez qu’on donne envie d’en lire davantage. On est tombé sur Kråkmo, un des volumes du journal que publiait Fayard, du temps que Fayard était éditeur ; nous sommes en 2009.

C’est le sentiment d’avoir été défait, et d’abord sur le plan de la « carrière littéraire », qui frappe d’emblée. Cet échec tourne, pour ce volume, autour de l’Académie française : on échoue à obtenir le Grand Prix du roman, et surtout à se faire élire sous la Coupole – et c’est toute une vie d’écrivain que cet échec noircit : « Jamais un succès, jamais : qu’est-ce que c’est que cette malédiction ? […] Quelle griserie ce doit être que quelque chose réussisse, pour une fois (ou régulièrement) ! Il est écrit, décidément, que ce ne sera pas mon lot. » Un jour qu’une promenade le mène dans un bois où, des années durant, il a dégagé des voies de passage, Camus découvre que ses sentiers ont disparu, recouverts par la repousse des branches et des feuillages. Ainsi ses efforts de débroussailleur n’auront servi à rien : tout est revenu à l’état antérieur, sauvage et naturel. C’est exactement le mouvement qui voit l’écrivain piétiner, sinon reculer dans sa propre voie, où toujours domine le sentiment de la perte : « Je sais que je n’aurai pas la force, ni l’envie, ni le temps de tout recommencer », dit-il de ce bois autant que de sa candidature. « Du coup ce sont toutes ces années qui me semblent perdues – celles au cours desquelles je suis passé de neuf à trois voix, à l’Académie française. » Si cet échec affecte réellement l’auteur, c’est qu’il le ramène au fiasco de ses ambitions. Très jeune, il était convaincu qu’il mènerait la vie mythique d’un écrivain d’importance. Or « ce n’est pas arrivé, et maintenant cela n’arrivera plus […]. Serait-ce arrivé, il me semble que ma vie, et certainement mon “œuvre”, auraient été beaucoup plus intéressantes. »

Un écrivain appartient à un art mort ; et cela n’entre pas pour rien dans l’impression d’une défaite plus générale, et qui va s’élargissant. Un épisode qui est anecdotique en apparence seulement en donne une image significative. On vend la bibliothèque d’un homme qui vient de mourir. Camus, qui en rachète une partie, prend conscience, et le lecteur avec lui, que si le livre a une valeur à l’achat, quelques années plus tard à peine, ou seulement quelques mois, il n’en a plus aucune ; et l’auteur de confesser sa gêne, sa honte, d’avoir payé quelques dizaines d’euros des livres qui, à leur propriétaire, avaient dû coûter une somme cinquante ou cent fois supérieure – et pour rendre la situation plus dérisoire encore, plus amère et plus triste, il rapporte que, pour l’achat du lit, dans cette maison, c’est toute la bibliothèque qu’il aurait pu emporter. Le livre ne vaut rien, du point de vue marchand ; il ne vaut pas davantage « physiquement », sur le plan de la qualité matérielle, de la robustesse par exemple (il se dégrade aujourd’hui infiniment plus vite que jadis, et même que naguère) ; mais il vaudra moins encore sur le plan esthétique : c’est ce que suggèrent à notre auteur les effarantes lettres électroniques qu’il reçoit d’aspirants littérateurs, messages sans ponctuation ni syntaxe, écrits dans une orthographe d’enfant diminué. « Nous nous sommes vu une fois, vous pouvé pas vous souvenir », lui précise un correspondant qui, comment en douter, veut devenir écrivain. C’est un idiome nouveau qui se parle et s’écrit désormais, non seulement chez les Français, mais aussi chez ceux qui aspirent à écrire des livres, au point qu’un jour, prédit Camus, les éditeurs seront las de traduire dans une langue académique ce néo-français, si lointainement inspiré de l’ancien. Ils cèderont, ils cèdent, ils ont cédé. (On le constate de plus en plus fréquemment : les c’est de lui dont il s’agit prolifèrent dans les livres d’aujourd’hui, parmi les avérer faux, les dilemnes, les après qu’il soit parti, les pallier à, et quantités d’autres mauvaises herbes. On a parfois le sentiment que les correcteurs ont cédé, d’épuisement peut-être. On garde par exemple un souvenir effaré de l’édition de La Cuisine des prix (Journal 1980-1993), de Jacques Brenner.) Le livre a rejoint, irréparablement, les autres objets de consommation courante, où lui est garanti un avenir de produit industriel : médiocre du point de vue esthétique, triomphant sur le plan commercial. Ainsi, la mort de la littérature française n’implique pas la mort du livre ni celle du français, bien au contraire : ce type de français et ce type de livre, la dégradation de celui-là croissant à proportion de la démonétisation de celui-ci, ne crèveront pas ; ils prospèreront, ils prospèrent.

En effet, les nouveaux auteurs auront de nouveaux lecteurs, et ceux-ci, pour qui le français traditionnel sera toujours trop difficile, trop riche, trop classique, feront le succès de ceux-là : « Aux nouveaux lecteurs, formés à la rude école des SMS, tout ce qui est écrit comme j’écris, en français officiel, en français tel qu’on l’enseignait et qu’on ne l’enseigne plus, paraîtra “trop bien écrit”, et donc ne pas s’adresser à eux. Vocabulaire, syntaxe, tout cela leur sera indifférent. J’allais ajouter le mot style, mais un scrupule m’a retenu. Non, ils pourront parfaitement apprécier le style de quelqu’un qui écrit “nous nous somme vu une fois, vous pouvé pas vous souvenir…”. Et peut-être cet auteur en aura-t-il en effet, du style. Mais ce sera dans une autre langue, qui naît tandis que la mienne meurt. » Cette langue qui meurt, c’était celle de la classe cultivée, essentiellement bourgeoise et aristocratique, également morte ; elles étaient nées l’une de l’autre, ensemble elles ont été vaincues. La langue qui naît, qui a défait la précédente, qui est née de ce crime, c’est celle de la petite bourgeoisie, dont le néo-français s’impose, comme triomphe sa néo-culture, qu’il n’est plus convenable d’appeler sous-culture d’analphabètes : les bandes dessinées, les chansons populaires, les romans de gare, et tout ce qui autrefois était considéré comme la version, médiocre et grotesque, de la peinture, de la musique, de la littérature. Il y avait Leroy, Ligeti et Bonnefoy ; il y a Enki Bilal, Abd al Malik et Fred Vargas – et c’est désormais à ceux-ci que l’on consacre des émissions, des colloques, des thèses. Dans ce retournement des valeurs culturelles, et des valeurs morales concomitantes, l’inculture d’aujourd’hui, c’est-à-dire la sous-culture des classes populaires, est devenue la culture ; quand la culture d’autrefois, les plus hautes œuvres de l’esprit produites par la classe cultivée, est l’objet d’un mépris sans équivoque.

« Le pire, ajoute notre auteur, est l’incroyable sérieux de tout cela », car ces amateurs d’« art populaire » (on a bien vu l’oxymoron : rien de ce qui est populaire n’est artistique, il n’est d’art que bourgeois) se voient « comme des savants, de grands érudits, des chercheurs. […] Jamais l’imbécillité n’a été entourée d’un tel faste, ni la niaiserie de pareils égards. » L’inversion morale à laquelle nous assistons (la bêtise et la paresse transformée en intelligence et en curiosité), parallèlement à l’inversion culturelle (l’inculture changée en art), rien ne l’atteste mieux que la mort de la honte (auquel Renaud Camus a consacré un Éloge, aux éditions P.O.L., en 2004). L’auteur remarque d’abord la stupéfiante grossièreté sans vergogne des anonymes interrogés par des journalistes lors des micros-trottoirs ; sans parler de celle des personnages publics, le Président de la République au premier chef ; mais c’est surtout le téléphone qui découvre le mieux la disparition du sur-moi : « Dans la librairie une femme a bien dû parler vingt minutes sur son téléphone portable. J’ai du mal à comprendre que les gens, s’ils ne sont pas retenus par la politesse, par la discrétion […], ne le soient pas par la peur du ridicule, ou par la honte, tout simplement – ma bonne vieille amie la honte, ce pilier de la civilisation. » (Curieusement, mais curieusement en apparence seulement, cette volonté de s’exprimer le plus fort qu’il se peut, et si possible aux oreilles de tous, s’accompagne, notamment sur Internet, d’une épidémie d’anonymes et de pseudonymes. Ici, on n’a pas honte de crier sa vie au plus grand nombre ; là, on aurait honte (c’est une hypothèse, et elle n’est pas celle de Renaud Camus) des « commentaires » qu’on laisse sur les sites et les blogs. Anyway, la grossièreté règne également ici et là.)

Andersen, fils d’un cordonnier et d’une servante d’Odense, est devenu un représentant éminent des lettres danoises, quand rien, socialement, culturellement, ne l’y prédisposait. Cette prouesse ne fut rendue possible que grâce aux bourgeois cultivés (à Odense d’abord, puis à Copenhague) qui acceptèrent de l’enseigner et de former son goût. C’est ce que constate Camus, qui prépare une de ses Demeures de l’esprit consacrée au Danemark et à la Norvège. C’est précisément ce lien incontestable entre classe sociale et culture – le niveau culturel croissant et décroissant à proportion du niveau social, l’art et la culture n’ont jamais été les produits du peuple mais toujours ceux de la classe aisée – que l’on conteste aujourd’hui. Cette négation s’accompagne d’une idéologisation des rapports sociaux : la classe populaire est autant entêtée par la célébration de ses vertus que par la volonté de ridiculiser la classe supérieure (ou l’idée qu’elle s’en fait, et qui se réduit le plus souvent à une classe populaire enrichie). Les petits bourgeois, tout en ayant vaincu, sont toujours animés par un fort ressentiment de classe à l’égard des bourgeois et des aristocrates. Ce complexe d’infériorité, volontiers haineux, est très clair, et clairement assumé, chez un certain nombre de figures du Paris « littéraire », Josyane Savigneau e.g.

Cette lecture idéologique des classes sociales, et de leurs rapports, est également nette dans Neuilly sa mère !, une comédie à succès (Camus tombe sur une émission de télévision qui l’évoque). « Sami Benboudaoud, 14 ans », vit « heureux avec ses potes dans sa cité de Châlon » ; or « le destin l’arrache un jour à son paradis, et le propulse dans l’enfer de… Neuilly-sur- seine ! » Dans un hôtel particulier, l’adolescent devra « partager le quotidien de Charles, son cousin du même âge, plein de préjugés racistes et obsédé par son ambition de devenir un jour… Président de la République ! » (Je dois ce résumé au site AlloCiné.) La banlieue est un « paradis », Neuilly un « enfer », le Français de souche « raciste » comme le jeune Samir doit être lui-même tolérant, imagine-t-on : on voit bien que l’inversion morale et culturelle s’accompagne fatalement, sous couvert d’antiphrase, d’une inversion idéologique.

S’il est certain désormais que l’on ne mènera pas la vie d’un grand écrivain d’autrefois, que l’on pratique un art mort dans une langue morte, tandis que triomphent des valeurs morales et culturelles que l’on nous avait appris à mépriser, si la civilisation entière a échoué à se maintenir (Je maintiendrai, la devise de Guillaume d’Orange est d’ailleurs la maxime préférée de la mère de l’auteur : or, précisément, cette mère meurt pendant la rédaction de ce volume du journal, et c’est aussi l’image de la fin d’une civilisation) – que reste-t-il ? D’autres crépuscules, sans doute, ceux du septembre déclinant, dans le Gers, où le soleil fait du ciel le cœur vivant d’une forge ; les voyages, qui seront l’occasion d’autres livres ; l’amour, avec certain Pierre. Il reste à persévérer dans son être, dans son œuvre, et dans la solitude qui seule est rédemptrice, puisque, de tous les instincts, celui qui fait le plus défaut à Camus est l’instinct de la meute : « J’aimerais bien savoir comment se nomme l’instinct inverse, l’instinct du sanglier, l’instinct singulier. J’y songeais lorsque j’ai croisé […] un groupe de marcheurs sous la houlette d’un guide qui leur montrait ce qu’il fallait regarder en tendant son bâton. Il me semble aussi stupéfiant de s’agréger pour marcher dans la montagne que d’aller visiter les monuments historiques lors des Journées du Patrimoine […]. Mais qu’est-ce qui peut bien pousser à se joindre au troupeau quand on pourrait très bien s’en dispenser ? Mieux, quand toute la jouissance (sur la lande, dans le jardin ou la galerie d’un château) a pour source et pour condition (de mon point de vue) la solitude ? »

En arrivant au bout de ces lignes, on se rend compte que l’on n’a rien dit encore, de cette œuvre, de son humour, par exemple, du rire ravageur qu’elle provoque souvent ; ni de ce style unique, tenu, ennemi de tout relâchement. On a seulement insisté sur le sentiment crépusculaire qui la traverse, comme il traverse, quand il ne les habite pas, celle des écrivains les plus intéressants d’aujourd’hui, qui tous décrivent la fin d’un monde, avec la victoire du nouveau ; c’est, parmi d’autres, le mérite de Renaud Camus que de donner les accents les plus déchirants à ce soleil finissant.

Lundi 21 août 2017

N.D.L.R. : Voici pourquoi, en dépit (ou à cause ?) de son caractère sulfureux, je suis un "ami Facebook" de Renaud CAMUS.

Je trouve des résonances fortes entre sa démarche et la mienne. Lui accumule les ouvrages qu'il édite désormais seul. Moi, j'ai restauré de vieilles pierres, avec le même sentiment qu'après mon passage sur Terre, les mauvaises herbes finiraient par reprendre le dessus. Lui continue d'écrire. Pour moi, la carrière de restaurateur de vieilles pierres est terminée, faute de carburant. Le mieux que je puisse faire désormais est de tenter de passer le relais. En aurai-je la force (ou la constance) ? That is the question.
Pierre-Paul FOURCADE
rédigé le Lundi 6 Novembre 2017
Vie des associations - Désultoirement vôtre ! - Pouvoirs publics, élus locaux - APIJOMM - api
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Au courrier de ce jour, absence du "Monde".

En revanche, une lettre du 24 octobre dernier, de 9 pages imprimées (excusez du peu), émanant de la M.S.A. et me réclamant le paiement des cotisations sociales du 3ème trimestre 2017, non sans assortir cette demande, d'ores et déjà (mais sur quelles bases ?), de "pénalités forfaitaires de retard". Ils ont pourtant reçu le bon chèque par L.R.A.R. du 21 dont voici le recepisse :

Quelle bande d'abrutis ! Ceux-là, y a pas photo, c'est vraiment les champions toutes catégories !

Poubelle.

P.S. : Je trouve instructif de compter le nombre de courriers que ces clowns m'ont adressés depuis le début de l'année, c'est-à-dire en 10 mois. Sauf erreur de ma part, il y en a eu 33, soit près d'un par semaine. Des courriers souvent d'une dizaine de pages, ce qui donne une idée de la folie furieuse de cette administraaaâââtion.

Et tout ça pour quoi, je vous le demande ? Pour un seul employé depuis le 1er février dernier.
A ‘tazza’ bowl by Giovanni Ambrogio Miseroni, c. 1610.

Tazze were elaborate vessels on a stand which came in a variety of different shapes. This one was made in the form of a grotesque mask with an open mouth and carved from smoky quartz, a rare variant of rock crystal prized for its dark translucence. It is the finest in a group of four bowls in smoky quartz recorded in the inventory of the Habsburg Emperor Rudolf II as having been ‘brought from Milan’, where the Miseroni family had its workshop and where most of the finest rock crystal carving of this period was done. Giovanni Ambrogio was the head of the celebrated Miseroni workshop at this time.

N.D.L.R. : Contemporain de la Chaslerie.
Bonsoir,

Taques aux armes des Le Din.
Connaissez vous une étude faite sur les plaques de cheminées de l'Orne par M. Du Mesnil du Buisson et éditée par la SHAO de 1947 à 1959 ?
J'ai constitué un dossier de cette étude en vue de la journée du patrimoine faite en septembre dernier à Joué du Plain (près d'Argentan).
Pour les taques Le Din SHAO 1957 - tome 75, pages 82 et 83 et SHAO 1959 - tome 77 pages 74, 75 et 76.

N.D.L.R. : Non, je ne connais pas cette étude. Où pourrais-je la consulter ? Cela m'intéresserait en effet.