Message #149

Pascal MAIZERAY est un homme précis et méticuleux. Il aurait sans nul doute pu poursuivre des études s'il n'avait dû suivre son père à la ferme. Il a choisi sur le tard de devenir maçon, lorsqu'il en a eu assez de devoir constamment mettre son exploitation à des normes toujours plus exigeantes et sans que, pour lui, les revenus ne suivent. C'est donc un autodidacte de la maçonnerie. Personne ne l'a réellement formé à son nouveau métier et cela lui manque parfois.

Il a remarquablement restauré les maçonneries de la charretterie et même un pinailleur comme moi y trouverait peu à redire. En revanche, sur le fournil de la ferme, je trouve qu'il commet parfois des erreurs.

Comme rapporté dans ce journal à la date du 10 avril dernier, j'avais déjà signalé à Pascal que je n'étais pas satisfait de l'ouverture qu'il avait créée dans le fournil de la ferme afin d'en aérer la future cabine de douche. Je trouvais que les pierres de l'ouverture n'étaient pas en phase avec les pierres environnantes, de sorte que la reprise était trop visible :

Pascal m'avait promis qu'à l'avenir, il se souviendrait de ma remarque. Or il vient de renouveler le même type d'erreur en ne choisissant pas bien les pierres qu'il a utilisées pour l'arc couronnant la nouvelle niche. Il a, à juste titre selon moi, préféré traiter cette ouverture en grès plutôt qu'en granite (car nulle part sur ce bâtiment il n'y a de granite) ; il a bien sélectionné les pierres pour les montants de la niche ; en revanche, il lui a fallu 7 pierres pour son arc là où je lui avais recommandé de n'en utiliser que 3 ou, à la rigueur, 5. Cela donne à mon avis à son arc une faiblesse de construction et une disgrâce dans l'aspect qu'on aurait dû éviter :

Vais-je pour autant lui demander de refaire cet arc en respectant mes orientations ? La réponse est non pour les raisons suivantes :

- bien que la ferme et ses dépendances aient été inscrites à l'I.S.M.H. en même temps que le manoir par un arrêté ministériel de 1926, ces bâtiments, dont le fournil de la ferme, n'ont pas été édifiés à l'origine avec le même soin que le manoir et ses autres dépendances ; cela nous donne un peu de flexibilité dans la restauration, et le permis de construire obtenu pour la ferme avec l'accord de l'administration des affaires culturelles l'illustre d'ailleurs sans nul doute ; à ce titre, il n'est pas inenvisageable d'apporter des modifications, même avec des erreurs de réalisation qui n'échappent pas à un oeil attentif ;

- la photo de la niche prise ce mardi matin avant le redémarrage du chantier montre la lenteur de la restauration en une journée de labeur pour deux hommes qui, pourtant, ne traînent pas ; exiger un arc en 3 pierres obligerait à défaire ce travail et à tailler de grosses pierres de grès, ce qui est toujours long et hasardeux puisque ce grès est schisteux ; je préfère d'autant plus m'en abstenir que mes employés sont payés non à la tâche mais à l'heure ;

- troisièmement, je sais d'expérience qu'il faut souvent admettre de petites erreurs sans graves conséquences pour permettre que les grosses, inévitables mais rares, se voient moins ; cela n'implique pas qu'il soit nécessaire de commettre sciemment des erreurs supplémentaires mais autorise à relativiser les couacs, notamment sur une dépendance de dépendance.

Donc retenons que, telle qu'elle se présentera, la niche de la statue du fournil de la ferme nous rappellera longtemps que nous sommes faillibles. Ce n'est donc pas une expérience inutile ni à gommer.

Indépendamment de la maçonnerie, je signale que notre tableau de chasse s'est complété, depuis mon dernier recensement, de trois bestioles, deux ragodins (dont un énorme) et un rat musqué, tous parfaitement gras et velus. Et dire qu'un syndicat des eaux de Flers pompe dans le Beaudouët l'eau potable destinée à ces voisins...

P.S. : En fin de journée, Pascal a placé un bouquet de fleurs au sommet du pignon Est du fournil de la ferme dont il vient d'achever la restauration de la maçonnerie. Il m'a ensuite déclaré qu'il fallait arroser. C'est ce que nous avons fait sans tarder (on pourra admirer au passage le confort du local qui sert actuellement de cuisine à la Chaslerie...).

Sur la photo, de gauche à droite, Maxime, PPF ("cupbearer and payer"), Thibaud (héritier présomptif, "homo pulosus, homo virilis"), Pascal, Bernard et Claude (toujours là quand il faut...), une assemblée qui n'engendre pas la mélancolie.

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